Parlez-nous des enfants
Encore un joyau de sagesse, et être sage lorsqu’il s’agit des enfants, voilà qui tient du prophète.
Je force un peu le trait mais quand j’appelle à moi des images concernant les enfants, je retrouve souvent celles-ci :
– l’extase d’avoir un enfant
– le sacrifice d’un parent à son enfant
– l’horreur de la perte d’un enfant
– la trahison de l’enfant à sa famille
Extase, sacrifice, horreur, trahison, nous sommes dans le domaine de la passion. Difficile d’être sage alors.
Un être humain accompli est autonome et responsable, libre de ses actes et conscient de leurs conséquences. Un parent qui aime souhaitera l’accomplissement de son enfant. L’enfance peut ainsi se concevoir comme la longue préparation du départ de l’enfant de sa famille.
Hors sous couvert d’amour, c’est bien souvent l’inverse qui se produit. Le parent cherche consciemment ou inconsciemment à maintenir un lien à l’enfant, qu’il soit d’influence, de reconnaissance, de dépendance...
Le cordon ombilical que la sage-femme coupe pour des raisons biologiques lors du premier départ, ce cordon devrait être à nouveau coupé par le sage-parent pour des raisons psychologiques lors du second départ.
Aux images précédemment évoquées, je souhaite substituer celles-ci :
– la crainte et l’espoir d’accueillir un enfant
– l’obéissance aux lois de la Vie
– l’initiation à l’indépendance
– la livraison à la Vie
Vos enfants ne sont pas vos enfants
Surtout n’oubliez pas : "Vos enfants ne sont pas vos enfants"
Je vous invite maintenant à découvrir le texte de Gibran, à porter votre attention sur l’image de l’archer...
Parlez-nous des enfants
Et une femme qui portait un enfant dans les bras dit,
Parlez-nous des Enfants.
Et il dit :
Vos enfants ne sont pas vos enfants.
Ils sont les fils et les filles de l’appel de la Vie à elle-même.
Ils viennent à travers vous mais non de vous.
Et bien qu’ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas.
Vous pouvez leur donner votre amour mais non point vos pensées,
Car ils ont leurs propres pensées.
Vous pouvez accueillir leurs corps mais pas leurs âmes,
Car leurs âmes habitent la maison de demain, que vous ne pouvez visiter, pas même dans vos rêves.
Vous pouvez vous efforcer d’être comme eux, mais ne tentez pas de les faire comme vous.
Car la vie ne va pas en arrière, ni ne s’attarde avec hier.
Vous êtes les arcs par qui vos enfants, comme des flèches vivantes, sont projetés.
L’Archer voit le but sur le chemin de l’infini, et Il vous tend de Sa puissance pour que Ses flèches puissent voler vite et loin.
Que votre tension par la main de l’Archer soit pour la joie ;
Car de même qu’Il aime la flèche qui vole, Il aime l’arc qui est stable.
Khalil Gibran, Le prophète
Suite, après la lecture : vous venez de découvrir le texte, je vous envie. Trouvez-vous comme moi que l’image de l’archer est porteuse ? Trouvez-vous comme moi que certains enfants sont des flêches qui entrainent derrière eux une lourde corde qui les relie à l’archer ? Trouvez-vous comme moi que la cible est alors difficile à atteindre ?
Si c’est le cas, je vous invite à une mise en perspective d’une rare puissance au travers de cette réflexion Zen :
Chaque fois qu’un archer décoche une flêche, il meurt. Chaque fois que la flêche atteint la cible, il renait.
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