Le radeau de la Méduse

Qui aurais-je été ?

Le radeau de la Méduse

Voici un rappel historique, emprunté à l’excellent site herodote, de ce qui inspira le fameux tableau de Géricault "Le radeau de la Méduse" :

Le 2 juillet 1816, la frégate La Méduse s’échoue au large de l’actuelle Mauritanie avec 395 marins et soldats à son bord.

Le navire a quitté Bordeaux le 27 avril, accompagné de la corvette L’Écho, de la flûte La Loire et du brick L’Argus.

L’expédition est commandée par un amiral émigré sous la Révolution, Hugues de Chaumareys (51 ans).

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Bien que dépourvu d’expérience, il a reçu du roi Louis XVIII mission de reprendre le Sénégal, que le traité de Paris a restitué à la France après la chute de Napoléon, quelques mois plus tôt.

Contre l’avis de ses officiers, l’amiral veut couper au plus court. Son navire, La Méduse, s’éloigne ainsi du reste de la division et s’engage sur le dangereux banc de sable d’Arguin, à 160 kilomètres des côtes africaines, où elle est bientôt immobilisée.

On tente de désensabler le navire en évacuant le matériel sur un radeau de fortune de 20 mètres de long. Mais cela ne suffit pas et il faut se résoudre à l’évacuation.

L’évacuation

Les officiers, les passagers et une partie des marins se replient sur la chaloupe et une demi-douzaine de canots. L’amiral est parmi les premiers à quitter la frégate !...

Mais 152 hommes, essentiellement des soldats, doivent se contenter du radeau. Serrés les uns contre les autres, ils ont de l’eau jusqu’aux genoux.

Dix-sept hommes, appréhendant le pire, préfèrent rester sur la frégate dans l’espoir d’être plus tard secourus.

Le radeau est tiré dans un premier temps par les canots et la chaloupe. Mais celle-ci, qui seule dispose d’une voile, n’arrive pas à guider l’ensemble.

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Au lieu de se rapprocher de la côte, les naufragés dérivent vers la haute mer... Une nuit, suite à une succession de malentendus plus ou moins involontaires, les amarres cèdent les unes après les autres.

Voyant cela, l’amiral abandonne le radeau à lui-même et met le cap sur la côte, vers Saint-Louis du Sénégal. Ses officiers, honteux mais résignés, le suivent.

Le drame

Avec très peu de vivres et cinq barriques de vin, le radeau va dériver 13 jours sous un soleil implacable.

Suicides, noyages, rixes s’enchaînent. Certains survivants découpent la chair des cadavres et s’en repaissent après l’avoir boucanée au soleil.

Quelques hommes encore valides jettent à la mer les blessés et les malades pour préserver les chances de survie des autres.

Le 17 juillet, les malheureux aperçoivent une voile à l’horizon. C’est L’Argus qui s’est mis en quête de l’épave de La Méduse pour y récupérer des documents officiels ! Mais L’Argus s’éloigne sans voir le radeau. C’est l’épisode que représentera plus tard Géricault sur sa célèbre toile.

Le 17 juillet 1816, le brick L’Argus, qui n’a pas vu le radeau de La Méduse, repasse quelques heures plus tard à proximité et cette fois l’aperçoit. Il recueille une quinzaine de rescapés. Cinq succomberont peu après leur arrivée à Saint-Louis du Sénégal.

Ayant également retrouvé l’épave de La Méduse, le brick n’en extrait que trois survivants sur les 17 hommes qui y étaient restés.

Le scandale

Le Journal des Débats publie le témoignage du chirurgien Savigny, l’un des rescapés du radeau. Il dépeint les violences extrêmes auxquelles ses compagnons et lui-même ont été réduits. Le récit soulève une immense émotion dans l’opinion publique.

L’amiral et les officiers passent en cour martiale. Hugues de Chaumareys est dégradé. Il échappe de peu à la peine de mort et s’en tire avec trois années de prison.

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Cette "aventure" humaine, avec le recul que permet l’histoire, est édifiante et troublante. Elle nous fait sentir que l’homme marche continuellement au dessus d’un gouffre qui pourrait à tout moment le précipiter des milliers d’années en arrière.

Tout en nous éclairant sur la fragilité de notre route, elle nous rend palpable la richesse et tout le potentiel de notre situation présente.

Elle éloigne aussi à tout jamais la certitude qui pourrait nous animer sur ce que nous sommes.

Se poser la question "qui aurais-je été sur le radeau de la Méduse ?", c’est en partie répondre à la question "qui suis-je ?", avec le sentiment troublant que ce début de réponse nous renvoie à un questionnement plus périlleux encore : "en suis-je bien certain ?"...

Si cette réflexion vous interpelle, vous pouvez la poursuivre en regardant le film "Les survivants" (1993 - Frank Marshall) dont voici le synopsis : "L’avion de l’équipe nationale uruguayenne de rugby s’écrase sur la Cordillère des Andes. Seule une vingtaine passagers en réchappe. Pour survivre dans ces conditions climatiques extrêmes, les rescapés sont contraints de recourir à ... "

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