L’ennemi
Ces quelques mots sont de ceux qui suffisent à guider une existence.
Ils éclairent la relation en miroir qui s’installe avec tout adversaire quel qu’il soit. Vous croyez être sage mais vous perdez votre sérénité pour des broutilles, vous croyez être fort mais vos adversaires sont toujours plus démunis que vous... Ces schémas décrivent quelqu’un qui se prend pour un lion mais qui n’affronte que des fourmis. Cette personne n’est pas un lion, elle est le reflet de son adversaire, une fourmi en l’occurrence.
David qui affronte Goliath est présenté comme une fourmi affrontant un lion, s’il en était ainsi alors David était un lion !
Méfions-nous néanmoins des apparences. Quand le plus jeune de deux frères affronte son aîné, on pourrait y voir David affrontant Goliath mais la réalité est plus complexe. Le jeune frère a grandi avec ce frère plus fort. Sa personnalité s’est adaptée à cette difficulté et elle lui est devenue naturelle. De son côté l’aîné a grandi avec cette supériorité naturelle et sa personnalité s’y est conformée. Il se peut alors que l’aîné ait plus de mérite à affronter quelqu’un de sa vraie force, que le plus jeune qui affronte un adversaire apparemment supérieur.
La moralité de cette histoire est la suivante : au delà des apparences, vous seuls êtes en mesure d’apprécier si votre adversaire est vraiment un lion !
Je suis souvent perplexe de découvrir à quel point les relations humaines dans le travail sont mesquines. Nombre d’individus vivent dans des conflits ouverts ou larvés avec d’autres collègues. Ces conflits sont toujours stériles, s’auto-alimentent et consomment une énergie psychique considérable.
Le mot ennemi est peut être fort pour qualifier ce genre de relation, mais à la réflexion pas tant que ça. En des temps ou la vie était précaire, l’ennemi était avant tout celui qui menacait l’intégrité physique d’un autre individu. Notre époque est beaucoup moins précaire et nous nous sommes habitués à ce que l’ennemi ne soit plus celui qui nous menace physiquement, mais celui qui nous menace psychiquement.
Car ces personnes avec qui nous sommes en conflit, si nous prenons le temps d’y songer, sont une menace pour notre personnalité. Ces personnes que nous traitons de fourmi et que nous affrontons intérieurement ou ouvertement nous renvoient à la part de fourmi qui existe en nous mais que nous ignorons. Vous dénigrez quelqu’un pour son avarice quand bien même elle ne vous a jamais porté préjudice, alors vous ne faites que révéler la part d’avarice qui est en vous mais que vous refoulez.
Vous n’êtes pas convaincu que ces personnes sont une menace pour votre personnalité. Demandez vous alors pourquoi il vous est si difficile d’abandonner la relation pour de l’indifférence ?
Dis moi qui sont tes ennemis, je te dirais qui tu es en quelque sorte.
Desproges.
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